Commenti disabilitati su HOLLANDE : FIN DU PACTE BUDGÉTAIRE OU COUP DE JARNAC À L’INTÉGRATION EUROPÉENNE ?

A lire : « Europe : feu le pacte budgétaire ? » Par Romaric Godin  |  17/11/2015, 10:36  |  1188  mots http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/europe-feu-le-pacte-budgetaire-522999.html

Le point essentiel de cet excellent article tient dans la citation suivante dont il fait l’analyse : « Devant le Congrès réuni à Versailles, il (Hollande) a déclaré que le « pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité. » » Est-ce la fin de l’austérité ? Non, au contraire ! Mais plutôt le début de la destruction potentielle de l’intégration européenne par une politique grossièrement aventurière et unilatérale. D’ailleurs, dans la perspective atlantiste subordonnée de ce président et de sa camarilla surreprésentée, il ne pouvait en aller autrement. Bien entendu, ceci concerne également l’aspect économique, pour ne pas dire militaro-industriel. L’adoption du TIIP, si elle a lieu, ne sera jamais qu’une extension mur-à-mur des dérives néolibérales actuelles dans une Europe déjà livrée à la « gouvernance globale privée », laquelle s’assujettit des pans de plus en plus importants de l’appareil militaire et sécuritaire (i.e., la dangereuse sous-traitance de ces fonctions régaliennes au secteur privé.) Les Préférences Communautaires préconisées par le grand économiste et citoyen M. Allais ne furent pas retenues ; pire encore, personne ne semble se soucier de la logique puissamment délétère de l’actuelle définition reaganienne de l’anti-dumping à l’OMC. (1).

Il me semble que les dérives militaristes, policières et budgétaires annoncées par la présidence française étaient déjà prévues depuis un certain temps. Les premiers commentaires médiatiques des gradés et autres spécialistes militaires allaient tous dans ce sens alors que les attentats avaient à peine pris fin. A l’instar des USA après le 9/11, il manquait uniquement le prétexte pour ajouter au social-fascisme, genre von Mises, du PS actuel la militarisation mur-à-mur du pays. Personne ne trouve à redire lorsque le Plan Sentinelle, genre d’opération développé en Afrique et ailleurs, est rapatrié pour être mis en œuvre sur le sol français! C’est sans doute une conséquence des coupures dans les effectifs policiers, mais cela semble néanmoins incroyable.

Pour autant, la citation cruciale tirée du discours du Président au Congrès mérite que l’on s’y arrête.

Apparemment, dans la précipitation, certains s’en sont réjouis. Espérons que la gauche soit moins naïve.(2) Peut-on croire que le dérapage militariste du budget, de surcroît sacralisé par un éventuel amendement constitutionnel liberticide, puisse augurer d’un changement de cap de la politique socio-économique actuelle ? Le multiplicateur de ces dépenses est quasiment nul alors que le multiplicateur sectoriel des dépenses publiques – santé, éducation, transport collectif, infrastructures etc. – reste encore très important malgré l’extroversion croissante de nos économies.

Ainsi, c’est justement le contraire qui se produira. Du fait de la faillite patente des politiques présidentielles à tous les niveaux, c’est bien pour poursuivre et renforcer les politiques inégalitaires actuelles que le gouvernement tente de militariser la société française et européenne, tout en se libérant de la logique impliquée par le sentier de consolidation fiscale et donc de la gênante tutelle de l’UE. Cette dernière fait trop voir le lamentable échec actuel même lorsqu’elle donne du lest au gouvernement sur le déficit dit « structurel » et sur la temporalité de la réintégration des critères budgétaires.

De plus, on sait déjà que cette militarisation coûtera très cher. De sorte qu’il serait impossible d’en gérer les coûts dans le cadre du Fiscal Compact et du Two et Six Pack sans être bientôt soumis à tutelle et pénalité, comme il advint pour la Grèce. La réaction des agences de notation ne se fera pas attendre. Un auteur américain a récemment mis en garde contre les dangers et les coûts exorbitants de cette militarisation de la vie politique et civile. La « guerre » contre le « terrorisme » a coûté selon lui US $ 1.6 trillion en termes directs et US $ 4.4 trillion en incluant les dépenses annexes comme les bénéfices accordés aux vétérans et ainsi de suite. (3) Il ajoute que les dangereuses lois visant le « terrorisme » », par ailleurs jamais défini, avaient surtout comme effet de museler les opposants tout en réduisant l’espace des libertés fondamentales. Tant pis pour Charlie et la « banlieue », n’est-ce pas ?

Ceci est déplorable car le sentier de consolidation fiscale néolibéral actuel est en crise partout. La France, ou plutôt ce président et ses gouvernements, sont incapables de le respecter depuis 3 années, malgré les promesses faites durant la campagne électorale. Ces promesses en disent long sur leur compréhension des processus socio-économiques actuels. La pauvreté et le chômage, ainsi que la dette publique française, croissent. Autrement dit, dans ce contexte de fin de cycle pour la finance spéculative hégémonique – vous souvenez-vous des promesses du Bourget ? -, une France pacifique et raisonnable aurait pu facilement trouver des alliés parmi les pays membres de l’Eurozone et surtout parmi leurs peuples. Cet appui aurait permis de changer le Fiscal compact et le plan de convergence encore plus hyper-centralisé qui émane du Rapport des 5 présidents, en faveur de l’Europe sociale promise lors du référendum sur la Traité de Maastricht. (4)

Par conséquent, le programme de régression social-fasciste à la von Mises du PS actuel continuera de plus belle. Le « Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire », ou TSCG, ne sera pas changé en ce qui concerne ses implications socio-économiques, ou alors seulement à la marge. Ainsi, quelle aubaine ( !), il y aura quelques créations d’emplois supplémentaires dans les appareils sécuritaires qui, pour autant, ne compenseront pas les coupures déjà effectuées, ni celles à venir pour cause de restructuration technologique.

Or, ce TSCG, c’est bien Hollande qui l’a stupidement imposé. En Italie, les dirigeants ont réussi à faire pire en le constitutionalisant dans l’Article 81. Hollande a procédé par une loi organique. Dans les deux cas, le peuple n’a pas été consulté, sans doute par peur qu’un référendum, n’eût produit un résultat identique au référendum de 2005 qui rejeta haut la main le projet de constitution néolibéral européen. Cette démarche avait pour seul but de prévenir tout changement de ligne budgétaire au cas où un gouvernement moins régressif serait arrivé au pouvoir.

On reconnaît-là l’inspiration singulièrement anti-démocratique et manipulatrice qui anime la présidence et ses gouvernements. Le même mépris du peuple souverain préside à la volonté de changer la constitution en la militarisant inutilement sans en référer au peuple par voie référendaire. (5)

On comprend dès lors aisément que le rejet unilatéral des obligations européennes sans pour autant remettre en cause cette loi organique vise uniquement à maintenir l’austérité, sans le carcan des critères budgétaires européens, tout en tentant de la légitimer ou plutôt de la masquer par la psychose militariste. Ceci me semble indigne du pays et surtout de la gauche française. Le socialisme français ne peut pas se mettre à l’école du juif-autrichien fasciste von Mises, ou alors il devrait changer de nom par respect pour celles et ceux pour qui le terme socialiste, sinon le terme français, signifie encore quelque chose. Autrement ceci devient une question de fausse représentation aggravée par une évidente surreprésentation de certains groupes. Ni le peuple, ni les membres du PS – qui ont d’ailleurs déserté en masse – n’ont plus droit au chapitre !

Bien entendu, si la France s’extirpe unilatéralement du Fiscal compact, celui-ci ne peut plus avoir la moindre légitimité ailleurs, en Grèce par exemple. Par conséquent, une négociation européenne s’impose au plus vite. J’espère donc que des efforts vont être faits pour sauver le processus d’intégration européen. Je crois que la seule voie acceptable dans les circonstances actuelles est celle de l’Europe conçue en cercles concentriques. (6) Les pays pour qui le Fiscal Compact semble encore être une bonne chose iront de l’avant en se regroupant, les autres pourront s’y abstraire puisqu’aussi bien il est désormais confronté chez eux à un échec tel qu’aucune dose de sacrifice supplémentaire ne pourra renverser la vapeur. La crise grecque n’est remise que de quelques mois. (Tsipras et ses conseillers, tel Goldman Sachs, l’ont voulu ainsi, d’où les fausses reculades du premier ministre grec …)

Les pays membres s’extirpant du Fiscal compact pourront par exemple faire valoir que le crédit n’est pas la monnaie. Si celle-ci relève de la BCE dans le cadre restreint de son mandat, le crédit relève pour sa part d’une compétence nationale (Art. 47 de la constitution italienne, par exemple ). Ne serait-ce qu’en partie, le crédit peut donc redevenir public et servir à financer la dette publique à très bas coût, comme ceci était le cas en France avant 1973 ou en Italie avant 1982, alors que les affaires sociales sont et demeurent une compétence nationale exclusive. Dans le cadre d’un retour au cloisonnement des 4 piliers bancaires-financiers ou, à tout le moins, de l’adoption d’un ring-fencing spécifique sanctuarisant les dépôts bancaires des épargnants ainsi protégés d’éventuels bail-ins, ce retour à la raison exige nécessairement un recadrage de la BCE et une gestion rationnelle nouvelle de Target II.

Il est clair que l’ « aide » des Etats membres aux autres Etats asphyxiés par l’austérité ne peut plus être une option car son coût déjà prohibitif est devenu insoutenable. Ceci vaut pour l’aide bilatérale comme pour l’aide européenne via le FSEF, le MES, l’OMT etc. L’Italie a sacrifié plus de 4 % de son PIB pour soutenir cette stratégie mal ficelée et contreproductive. Elle ne sert en réalité qu’à sauver les banques privées en supprimant la loi de la concurrence qui demeure le seul mécanisme d’autocorrection du mode de production capitaliste, contribuant ainsi à aggraver la crise et son « credit crunch »chronique. Les autres pays européens, y compris les récipiendaires de cette « aide » ( !), ne sont pas en reste. Les QE ne seront guère plus utiles à moins de noyer le bilan de la BCE avec des junk bonds. Cette remarque vaut également pour les ABS, à moins que, paradoxalement, les ABS ne viennent soutenir que les entreprises jugées être sans risques. Dans ce cas les bénéficiaires seront celles qui n’en ont pas besoin – elles nagent d’ailleurs sur des océans de cash malgré le « credit crunch » chronique. Dans ce cas, les ABS contribueront uniquement à accélérer les fusions transeuropéennes et globales vers les centres de la finance spéculative, ce qui revient à une perte de contrôle économique national et à des sorties massives – outflows – de capitaux, lesquelles s’ajouteront à celles déjà causées par le financement de la dette.

De plus, pour passer outre aux traités, le Président français en appelle à la solidarité de l’OTAN. Ceci vise à faire avaliser par la bande un « état de guerre » qui n’a pas lieu d’être puisqu’il s’agit de lutte contre le terrorisme – dans ce cas particulier, un terrorisme créé, armé et financé par l’Occident même, avec la désastreuse contribution idéologique et financière des pétromonarchies, pays où les droits humains sont gravement violés tous les jours, pays qui pratiquent une sorte d’esclavage moderne vis-à-vis de leurs populations de travailleurs immigrés. A moins de vouloir trivialiser l’OTAN pour en faire une gendarmerie à déployer en Europe contre les peuples européens, la solidarité ne peut pas être étendue à l’Article 42.7 du Traité. L’image internationale de l’Europe, sa vocation de justice et de paix dans le monde en serait durablement ternie.

De plus, cette dérive européenne voulue par Hollande n’aurait plus rien à voir avec le budget – même en référence à l’Article II de l’OTAN portant sur l’économie – car elle concernerait une aide militaire pour des décisions auxquels les autres pays n’ont en aucun cas été consultés. Ce serait tout bonnement un holdup hollandien arrogant sur l’Otan. Je doute que les pays membres apprécient malgré la compassion naturelle et sentie pour les victimes de la monstrueuse boucherie du 13 novembre dernier durant laquelle, selon le président, des Français ont tué des Français. Or, en l’occurrence, nous ne sommes pas confrontés à une action de guerre d’un niveau tel qu’il faille engager l’Otan. Le pourrissement de la meurtrière situation syrienne pour laquelle Hollande a une très sérieuse responsabilité personnelle ne date pas du 13 novembre, la causalité serait plutôt inverse. L’UE doit donc s’en tenir à ses traités et œuvrer pointilleusement dans le cadre de l’ONU, dans le respect de la lettre et de l’esprit de la Charte qui répudie toute prétention singulière au profit de droits et de règles laïques et universelles. Son avenir en dépend.

Espérons que l’Europe saura résister à l’esprit de psychose dans laquelle on veut la piéger et qu’elle saura défendre l’intégration européenne en sachant transformer les problèmes actuels en opportunités. Espérons qu’elle refusera de participer à cette épouvantable dérive militariste. Car le dérapage budgétaire de la France et d’autres pays membres, n’est pas dû aux mesures de sécurité à prendre face à des périls nouveaux, il existe en France depuis l’arrivé de ce président et de sa camarilla que la réalité des choses déclare incapables, incompétents et dangereux pour les libertés fondamentales.

La vocation de la France n’est pas d’être une succursale dirigée par des servi in camera surreprésentés. En réaction à la guerre de Napoléon le Petit, qui mena à la Commune en 1871, Arthur Rimbaud a écrit : « Ma patrie se lève, je préfère lorsqu’elle est assise.»

Paul De Marco, ex-professeur de Relations Internationales – Economie Politique Internationale. Le 18 novembre 2015.

Notes:

1) Pour l’anti-dumping on se reportera à mon Appel dans ce même site.

2) Jean-Luc Mélenchon dénonce « une défaite morale » de François Hollande, LE MONDE | 17.11.2015 à 06h57 • Mis à jour le 17.11.2015 à 11h37 | Par Raphaëlle Besse Desmoulières http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/11/17/apres-le-discours-de-m-hollande-la-gauche-de-la-gauche-entre-desaccords-et-embarras_4811408_823448.html?xtmc=melenchon&xtcr=1

Citation : « Et M. Mélenchon de lister ses désaccords. « En gros, on nous propose d’échanger des libertés contre la sécurité », résume-t-il. Pour lui, la prolongation de l’état d’urgence souhaitée par M. Hollande revient à « fabriquer un état d’exception permanent », « un genre de Patriot Act » à la française … »

3) To France From A Post-9/11 America: Lessons We Learned Too Late Submitted by Tyler Durden on 11/17/2015 22:30 -0500, Submitted by John Whitehead via The Rutherford Institute, http://www.zerohedge.com/news/2015-11-17/france-post-911-america-lessons-we-learned-too-late

“They that can give up essential liberty to obtain a little temporary safety deserve neither liberty nor safety.” ? Benjamin Franklin

“Voice or no voice, the people can always be brought to the bidding of the leaders. All you have to do is tell them they are being attacked and denounce the pacifists for lack of patriotism and exposing the country to danger. It works the same in any country.”—Hermann Goering, German military commander and Hitler’s designated successor

Pour le plan Sentinelle voir http://www.defense.gouv.fr/actualites/articles/integrale-operation-sentinelle-les-militaires-sur-le-pied-de-guerre-jdef et Face au terrorisme, les missions de l’armée française vont changer, LE MONDE | 30.07.2015 à 16h07 • Mis à jour le 30.07.2015 à 16h15 | Par Nathalie Guibert http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/07/30/face-au-terrorisme-les-missions-de-l-armee-francaise-vont-changer_4705150_3224.html?xtmc=plan_sentinelle&xtcr=4

4) Dans mon Tous ensemble j’avais plaidé pour des ratios Cooke nationaux au sien de la BCE et pour le retour, du moins en partie, à une finance publique, ce qui nous aurait épargné la crise actuelle. On a préféré l’hypercentralisme du pitre Mundell tout en rebaptisant immédiatement les ratios Cooke en ratios McDonough selon l’usuelle technique du brouillage des pistes. Le Rapport de 5 présidents sur l’union économique et monétaire est encore plus hypercentralisateur, voir :  http://ec.europa.eu/news/2015/06/20150622_fr.htm

5) comparer avec l’attitude de de Gaulle : https://www.youtube.com/watch?v=ywdfHSCZJpw  . Mais on sait que la constitution de 1958 ne plaît plus à des Kessel et Cie ; d’autres avaient également prétendu que la laïcité n’est qu’une idéologie comme une autre … Reportez-vous par exemple à mon Livre III dans la section Livres-Books de www.la-commune-paraclet.com; il suffit d’utiliser le terme « voile » avec la fonction « rechercher » pour aller directement aux pages pertinentes.

6) L’intégration européenne a d’ailleurs toujours fonctionné ainsi par cercles concentriques misant sur la force de persuasion des meilleurs expériences. Ainsi le marché commun vis-à-vis de la zone de libre-échange de l’Europe du Nord ; la Communauté puis l’Union européenne versus l’Eurozone etc. J’ai tenté de démontrer dans mes articles portant sur l’Europe dans la section Economie Politique Internationale du site www.la-commune-paraclet.com qu’on pouvait favoriser ce processus d’émulation des meilleurs expériences. Pour ce faire, il faudrait remplacer les processus censitaires de décision actuels par le droit de véto au niveau du Conseil, lequel serait atténué par la possibilité de l’opting out. Le tout dans le respect des compétences exclusives nationales ou européennes ou partagées. Un Etat choisissant l’opting out devra alors prouver à son électorat que sa décision est la bonne, autrement il sera sanctionné aux prochaines élections. La parole reviendrait ainsi au peuple souverain. Dans cette optique, la représentation au Parlement de Strasbourg devrait être proportionnelle à la population, car le droit de véto au niveau du Conseil offrira une protection suffisante. Cette démocratisation se reflèterait naturellement sur l’organisation confédérale européenne des partis politiques et des groupes d’intérêt, donnant ainsi aux peuples membres, ainsi qu’à leur société civile, la certitude de pouvoir réellement peser dans les processus de prise de décision, sans pour autant devoir remettre en question leurs spécificités nationales qui, au contraire, forment le bouquet civilisationnel européen auquel nous sommes toutes et tous attaché-e-s.

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