Commenti disabilitati su UNE BAUDRUCHE VITE DÉGONFLÉE: LA SIGNIFIANTE DÉFAITE ELECTORALE D’EMMANUEL MACRON

« On court dieu sait pour où, ça tient du mauvais rêve.»  Aragon*

Nonobstant le chœur servile et de plus en plus ignare des médias mainstream, le candidat Macron a subit une défaite signifiante lors du second tour des élections présidentielles. A part le nouveau président, personne d’autre ne semble s’en être aperçu, emportés qu’ils étaient à faire leur devoir de diabolisation sur commande de Mme Marine Le Pen.

Ce nouveau président par défaut, parachuté de « qui sait d’où » et qui ne différencie même plus sa gauche de sa droite – tout semble être uniformément dans la doudou, pace Seymour Lipset et Sidney Verba … -,  a réussi le prodige de mettre à mal le mécanisme de quasi plébiscite assuré par le second tour. Ce mécanisme de légitimation politique fut voulu par les rédacteurs de la Constitution de la Vè République pour abstraire le pouvoir présidentiel, en partie du moins, du jeu politique et souvent politicard des partis.

Ce n’est pas rien, et Mr. Macron est suffisamment bon énarque pour s’en être rendu compte le soir même. En se reportant à l’ensemble de l’électorat, il n’a obtenu que 43,6 % des voix. Pour un candidat qui veut gouverner par ordonnance pour diminuer voir abolir le Code du travail et les mécanismes de concertation sociale constitutionalisés, cela n’est pas très folichon.  Son programme est une copie cartésienne de celui de Gutgeld-Renzi ; il émane des mêmes milieux financiers-impériaux et conduit inéluctablement aux mêmes abysses. Sa progression au second tour fut désastreuse alors que celle de Mme Marine Le Pen fut significative, surtout compte tenu de la diabolisation quasi unanime des médias ainsi que des partis et des syndicats officiels, tout spectre politique confondu. La candidate Le Pen réussit à accroître son score de 12 %, ce qui dans les circonstances est considérable. (1)

Le mérite en va au positionnement intelligent de la candidate ainsi qu’à celui tout aussi intelligent et courageux de Mr. Dupont-Aignan. Car, pour peu que l’on lise le programme de Mme Le Pen avec objectivité, pour autant que l’on puisse faire abstraction des relents de xénophobie, ce programme est tout à fait digne d’une droite républicaine se souvenant que la souveraineté vient du peuple et d’aucune autre source possible.

Toutefois cette réserve n’est pas mince, mais je crois que sur la question de l’immigration le parti prochainement refondé de Mme Le Pen se mettra en syntonie avec la Constitution française, la Déclaration Universelle des Droits et avec le Traité de Lisbonne, bien entendu sans oublier que l’immigration est une compétence partagée au sein de l’UE. En ce qui concerne la sécurité et la défense, Mme Le Pen semble bien plus rassurante que l’atlantiste Macron, ne serait-ce que par sa position gaulliste concernant l’Alliance atlantique et le commandement intégré. Le nouveau président est au contraire un disciple avoué des théoriciens de la guerre préventive, de ses chocs de civilisation et de ses états d’urgence permanents, vulgaire imitation du Patriot Act. Pour c e qui est de la conception de la justice, espérons que l’influence du mouvement Debout la France ! influera en faveur d’une coercition pédagogique sans surenchère pour la coercition punitive qui n’a de toute manière jamais donné de bons résultats. Finalement, en ce qui concerne l’économie, il convient de rappeler que la France était plus performante du point de vue socioéconomique lorsque les « champions » soi-disant «nationaux », en réalité cotés en bourse et inféodés à la « gouvernance globale privée » n’avaient pas encore substitué les entreprises publiques – c.-à-d. d’Etat – offrant des services publics à accès universel à tous les citoyens et tous les résidents considérés non pas comme des clients mais comme des usagers.

Quoiqu’il en soit une partie politique déterminante pour la France et pour l’Europe va se jouer durant les prochaines élections législatives de juin. Nous assistons, en effet, à la remise en cause radicale des grands partis mainstream qui sont tout aussi discrédités que l’austérité qu’ils défendent transversalement. La performance de Mme Le Pen et celle de Mr. Dupont-Aignan induira la restructuration de la droite en supprimant ainsi le jeu politique imaginé par le Président Mitterrand lorsqu’il mit le pied à l’étrier au FN de manière assez machiavélique pour ôter des voix à la droite. Une droite républicaine, citoyenne, donc moins philosémite nietzschéenne, sera de bon augure pour le pays et pour l’UE.

Elle le sera aussi paradoxalement pour la gauche. Le PS semble devoir finir comme l’ancienne SFIO pour des raisons identiques. (Même du fond de la prison dont il sortit vivant sans aucun étonnement, Léon Blum était convaincu d’appartenir « à la race de Herder » (sic !)). Le PCF actuel ne représente même plus l’ombre de son histoire passée, refusant besogneusement de publier les meilleures contributions marxistes modernes, surtout lorsqu’elles vont au cœur de la théorie scientifique de Karl Marx, à savoir la théorie de la valeur et la critique de l’exclusivisme, critique sans laquelle aucune forme de démocratie républicaine n’est concevable.

Mr. Mélenchon a parfaitement le droit d’affirmer qu’il n’est pas communiste. Les économistes que le conseillent sont dans la même situation bien qu’ils seraient encore moins capables de défendre leur fonction de production marginaliste que le furent jadis Samuelson et Solow durant la fameuse « controverse des deux Cambridge », mon propre travail se portant garant de cette affirmation.  Dès le départ, ma conviction fut que son rôle, d’abord subalterne au PS, consistait à rogner des voix au FN au sein de la classe ouvrière traditionnelle, et surtout à contrôler le PCF afin d’en assurer la disparition définitive en le fondant dans le magma politique sorti tout armé de son imagination.

Il se trouve que le marxisme étant science – je défie quiconque de prouver le contraire en me donnant le droit de réponse, surtout en ce qui concerne les domaines de l’économie et de la démocratie – la position assumée par Mr. Mélenchon ne peut être qu’une illusoire et dangereuse narration sans avenir. J’ai déjà dit – par exemple dans mon Pour Marx, contre le nihilisme (2002) – que je considérais les narrations comme néfastes à la démocratie. En effet, les choix des citoyens doivent par définition reposer sur une information objective donc vérifiable et contestable. Je considère également que la culture du secret, qui justifie ces cuisines narratives condescendantes pour le peuple, n’est qu’un atavisme anti-démocratique par excellence. Jaurès était marxiste en économie et assez peu bourgeois pour ce qui est de la démocratie qui de formelle devait devenir réelle, ce qu’il illustra, par exemple, par son exemplaire défense de l’expérience de Carmaux, une expérience cruciale pour le développement du socialisme démocratique. (2) Ce qui n’est pas fondé sur la science – la Raison, disait-on jadis – va dans le mur et c’est bien ainsi. Cela étant dit fraternellement.

Il importe donc de poser les jalons pour la recomposition marxiste de la gauche française et par conséquent européenne. Ce qui signifie planification socioéconomique, ne serait que sous la forme de la planification indicative et incitative, dite à la française. Cette dernière suppose des entreprises d’Etat, au moins dans les secteurs stratégiques, ainsi que le contrôle public du crédit, donc de l’endettement public et parapublic. Ce qui implique également un processus de démocratisation de la démocratie représentative grâce à sa substitution progressive par la primauté accordée de la démocratie industrielle et sociale. Aujourd’hui les relations de pouvoir au sein du processus de production immédiat sont caractérisées par la tyrannie, celle dérivant de la propriété privée, et ceci dans un contexte de régression contemporaine sans précédant (Voir le démantèlement du Code du travail, Le Jobs Act italien et de plus en plus à la francaise, de la concertation sociale etc.) Je renvoie ici au chapitre « Pour le socialisme cubain » du livre déjà cité ainsi qu’à mon Précis d’Economie Politique Marxiste.

Une telle France façonnera l’Europe sociale fondée sur la confédération de ses Etats-nations membres, à laquelle le peuple français et les autres peuples européens aspirent ardemment. Je renvoie ici à mon texte antérieur disponible dans ce même site et intitulé « Le faux dilemme : populisme contre globalisme ».

Paul  De Marco, Copyright © La Commune Inc., le 08 mai 2017

Notes :

* ) Voir « La guerre et ce qui s’en suivit » ( poème de Louis ARAGON ). Ce poème fut mis en musique et chanté par Léo Ferré v. https://www.youtube.com/watch?v=2JIlzxwsBMo . Dans le contexte délétère actuel, il serait utile de faire circuler le livre d’Aragon intitulé Les communistes ainsi que ceux de l’universitaire américain Grover Furr.

1 ) Le second tour de la présidentielle 2017 en 8 chiffres, Nombre de voix, votes blancs, score du FN… analyse des résultats en huit chiffres. LE MONDE | 07.05.2017 à 23h35 • Mis à jour le 08.05.2017 à 10h53 | Par Adrien Sénécat, Maxime Vaudano et Eléa Pommiers http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/05/07/le-second-tour-de-la-presidentielle-2017-en-8-chiffres_5123931_4355770.html

2 ) Je renvoie à la discussion sur les Fonds ouvriers susceptibles de changer la forme de propriété dans mon Tous ensemble. Cet usage des nécessaires Fonds ouvriers me permettait d’affirmer que « le temps de Carmaux était venu ».

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