Commenti disabilitati su Réquisition des personnels et démocratie industrielle et sociale? Le droit de grève et les négociations syndicales sont pourtant le meilleur remède contre les inflations, 12-13 octobre 2022.

Commentaire rapide de l’article : « La grève se poursuit chez TotalEnergies et Esso-ExxonMobil, le gouvernement lance les réquisitions des personnels

Ils ont décidé de défier le gouvernement. A l’appel de la CGT, les grévistes des groupes pétroliers TotalEnergies et Esso-ExxonMobil ont annoncé, ce mercredi, poursuivre leur mouvement pour de meilleurs salaires, prolongeant les pénuries de carburants qui affectent la France entière. Dans ce contexte, le gouvernement a décidé de réquisitionner du personnel dans le dépôt normand Esso-ExxonMobil de Port-Jérôme (Seine-Maritime). latribune.fr , 12 Oct 2022, 9:24 , https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/carburants-la-greve-se-poursuit-chez-esso-exxonmobil-la-journee-s-annonce-decisive-936339.html

Avant de passer à mon commentaire rapide ci-dessous, on pourra jeter un coup d’œil à ces liens pour avoir une meilleure idée du contexte tel qu’il est vécu en France :

PÉNURIES DE CARBURANT : LE GOUVERNEMENT S’ATTAQUE AU DROIT DE GRÈVE , BLAST, Le souffle de l’info , 12 octobre 2022, https://www.youtube.com/watch?v=KTIaUnDKIs8

Voir en particulier à 6 :12 le camarade en grève explique que la réquisition ne les effraie pas, que la grève n’est pas un blocage mais l’exercice d’un droit fondamental  et que la réquisition des salariés – à distinguer de celle des produits – est illégale et fut effectivement déclarée illégale du temps de Sarkozy.

GRÈVES, POLICE : LE PAYS CRAQUE , Le Média , 12 octobre 2022, https://www.youtube.com/watch?v=jo9i5zhQcic

Voir à 5 :46 la raffinerie de Donges, près de Nantes, réagit aux menaces de réquisition de salariés du gouvernement en entrant en grève ce matin, 12 octobre.

C’est le BORDEL en FRANCE ! (Pénurie, grèves, manif…) , 13 octobre 2022

Canard Réfractaire , https://www.youtube.com/watch?v=WFAZEGUH1t8

A 7 :48, « Les grèves prouvent que sans nous, sans notre travail, sans notre consentement, ces gens-là ne sont rien d’autre que de la langue de bois et ils le savent et vous le savez. »

A 12 :21  « Qu’on soit d’accord ou pas, pas de soucis mais qu’on se parle m… On vous avait prévenu ici que l’hiver serait chaud, et bien là on est au début de quelque chose. Alors allons-y, sortons rencontrer des gens, sortons nous faire de nouveau pots, sortons changez mille fois d’avis, sortons pour gravez dans nos mémoires des moments d’anthologie, sortons pour reprendre puissance. Par la grève, par les occupations, par les mobilisations, par les manifestations, par tout ce qui est possible, je crois que plus que jamais on a besoin d’être forts ensemble, alors soyons forts ensemble. » .

Pénurie de carburant, en direct : la justice rejette le recours de la CGT contre les réquisitions à la raffinerie de Port-Jérôme-Gravenchon

La CFDT et la CFE-CGC ont trouvé un compromis avec TotalEnergies, vendredi, pour une augmentation des salaires de 7 %. La CGT, qui réclame 10 % d’augmentation, avait quitté la table des négociations dans la nuit., https://www.lemonde.fr/economie/live/2022/10/14/penurie-de-carburant-en-direct-un-accord-en-vue-dans-les-raffineries-totalenergies-avec-la-cfdt-et-la-cfe-cgc-la-cgt-reconduit-la-greve_6145761_3234.html

La justice rejette le recours de la CGT contre les réquisitions à la raffinerie de Port-Jérôme-Gravenchon

Le tribunal administratif de Rouen a rejeté vendredi matin le recours en référé de la Confédération générale du travail (CGT) pour contester les arrêtés préfectoraux de réquisitions de personnels grévistes du dépôt de la raffinerie Esso-ExxonMobil de Port-Jérôme-Gravenchon (Seine-Maritime), a-t-on appris de source judiciaire.

Dans son jugement, que l’Agence France-Presse a pu consulter, le tribunal administratif estime notamment que « le recours à des mesures de réquisitions individuelles d’agents qualifiés présente un caractère nécessaire pour prévenir les risques d’atteinte à l’ordre public eu égard à la durée des défaillances d’approvisionnement causées par la grève ».

Mon commentaire : Ceci est clairement abusif puisque une grève est une cessation du travail ; elle a donc forcément des conséquences sur la production ce qui ne saurait être qualifié comme une atteinte à l’ordre public, d’autant que le droit de grève est un droit constitutionnel qui constitue le cœur du modèle social entériné par la Constitution et que l’Etat dispose de réserves stratégiques – qu’il n’utilise pas à dessein pour pourrir la situation. Il les utilise par contre pour alimenter l’Allemagne dans le cadre d’un accord européen. Quels sont les recours : le Conseil  d’Etat et l’OIT ? Toujours est-il que la gauche au pouvoir devra remettre les pendules à l’heure et développer la démocratie industrielle et sociale en ajoutant la planification interactive – voir par exemple l’ébauche tentée dans le chapitre « Pour pour le socialisme cubain » dans mon Pour Marx, contre le nihilisme, section Livres-Books de mon vieux site expérimental www.la-commune-paraclet.com en vaillant toutefois à ne pas confondre centralisme démocratique et pluralisme conflictuel bourgeois.  

En attendant ce manque de respect pour la Constitution sur un droit vivement reconnu comme un droit social fondamental par tous, finira par discréditer totalement cette classe politique hors sol qui ne respecte plus rien.  

C’est une atteinte grave qui envenimera les choses puisque les travailleurs sont dès lors obligés d’élargir le mouvement. (Au fond, pour les grévistes, c’est mieux ainsi car la réquisition porte sur quelques personnes et ôte une partie de la gêne ressentie par les autres citoyens qui, selon de récents sondages, pensent en majorité que le gouvernement et le président ne sont pas à la hauteur…

Paul De Marco )

Commentaire rapide : Sans indexation à 100 % des revenus – salaires, pensions, assurance-chômage, assistance sociale – nous sommes en présence d’un vol organisé qui accroîtra les inégalités déjà criantes tout en plongeant nos pays dans la dépression économique de longue durée. Vous n’êtes pas ouvriers raffineurs – soumis aux 3-8, à la pollution, dont le kérosène etc., peu importe, faites le calcul : à la fin de l’année, sans indexation, combien de paies, de pensions ou de montants d’aides  mensuelles aurez-vous perdues ? La lutte des grévistes du secteur pétrolier porte une exigence socio-économique minimale puisque les inflations affectent le standard de vie de la population en général et que la négociation est le moyen démocratiquement entériné pour effectuer un meilleur partage de la richesse issue des procès de production. Tout le monde est concerné. L’expression de la solidarité générale en acte de la population est donc inévitable. 

Le droit de grève ne peut en aucun cas être conçu comme une menace à l’ordre public ou à la sécurité, surtout lorsque le gouvernement dispose de réserves stratégiques. C’est un droit constitutionnel qui, de concert avec le droit au travail et avec la concertation des acteurs sociaux au sein du Conseil Economique , Social et Environnemental, constitue le cœur de nos Etats sociaux s’appuyant sur la reconnaissance simultanée des droits individuels et sociaux qui définissent les différentes facettes de nos démocraties avancées. L’Etat de droit s’accompagne de la démocratie représentative et de la démocratie industrielle et économique, cette dernière étant matérialisée tout premièrement par le Code du travail, par le droit de grève, donc d’association et de négociation, et par la gestion autonome de la Sécurité Sociale. S’y ajoutent, de manière certes encore embryonnaire mais croissante, les formes de démocratie participative et le développement des instances démocratiques de contrôle –Droit de rappel, prudhommes, comités citoyens des plaintes etc.

Je crois que les réquisitions des personnels sont totalement illégales puisque : 1) elles ne visent pas vraiment la préservation de la sécurité et de l’ordre publics qui ne sont aucunement mis en danger par les grévistes ; 2 ) elles visent au contraire à supprimer de facto le droit  de grève en détruisant sa base contractuelle, à savoir le droit des travailleuses et des travailleurs de cesser de travailler, le cas échéant, tant que la négociation sur les salaires et les conditions de travail n’a pas abouti. Le droit de grève, donc du retrait de la prestation du travail dans le procès de production, est constitutionalisé. Il est en outre garanti par la signature de nos pays à l’OIT.

En l’occurrence dans le cas présent, le gouvernement a sciemment choisi de substituer la réquisition des produits, tolérable dans certains cas, par la réquisition des personnels en grève. Ceci pose alors la question des réserves stratégiques par ailleurs mises sous tension par la politique guerrière et pro-atlantiste et par des sanctions sado-masochistes qui pénalisent uniquement nos pays européens sans autres résultats patents. Les accords énergétiques européens dans ce cadre atlantiste irrationnel oblige la France à transférer du gaz en Allemagne alors même que les réserves stratégiques ne sont pas remplies. Au demeurant, assure-t-on la sécurité et l’ordre public, dans leurs acceptions les plus fortes liées à la défense nationale, en permettant une vulnérabilité sectorielle telle qu’elle force le pays à importer près de la moitié de son gazole et Total et d’autres entreprises stratégiques à délocaliser leurs raffineries ou leurs usines au nom d’une transition écologique soumise aux narrations ineptes du GIEC?

Les grévistes et le droit de grève ont bon dos, alors que les grévistes furent sciemment ignorés depuis mars 2022 ! Au vu des précédents juridiques en la matière, par exemple le jugement de Melun en 2010, je ne crois pas que l’arrêté du Tribunal administratif de Rouen tiendra la route. Le meilleur moyen de préserver l’ordre public c’est de respecter la Constitution et les lois, c’est de respecter le processus de négociation. Une réquisition abusive peut être apparentée à l’utilisation de l’Etat comme briseur de grève dans un processus de négociation du secteur privé où le patronat ne démontre pas un grand souci de négocier de bonne foi puisqu’il traîne les pieds depuis de longs mois et que, spécialiste dans l’instrumentalisation de la politique du ressentiment à l’instar du gouvernement et des mass-médias, il propage des mensonges sur le revenu « moyen » des grévistes … Ceci alors que, dans le cas de Total, son entreprise engrange des profits records pour le premier semestre 2022, ce qui lui permet de verser de forts dividendes aux actionnaires tout en augmentant le salaire du PDG de 50 % à 6 millions d’euros.  La bonne foi est à la négociation ce que le libre consentement est à la signature de tout contrat. Il est bon de rappeler que les raffineurs avaient lancé leur mouvement de grève le 27 septembre 2022 ; un manque d’empressement similaire des directions à négocier sérieusement sans attendre se manifeste partout, par exemple au théâtre de l’Odéon à Paris. On ne peut y voir qu’un calcul politique.   

En diminuant inconsidérément un droit constitutionnel central de notre système démocratique, cet arrêté ne fera que jeter de l’huile sur le feu, nuisant profondément au bon ordre public et à la confiance des citoyennes et des citoyens en la bonne tenue des institutions. Les grévistes n’auront alors d’autre choix que d’élargir le mouvement pour se faire entendre. Ils seront secondés par la grande majorité de la population elle-même très attachée à ses droits fondamentaux individuels et sociaux. De surcroît, la France, signataire du Traité de Versailles instituant l’OIT, en sortira une nouvelle fois inconsidérée au plan international, comme cela fut le cas pour les violences policières sous cette même présidence.          

Nous avons donc à faire ici à un abus typique de cette présidence et de ses gouvernements qui violent sciemment la Constitution et le processus démocratique , dont la démocratie industrielle et économique. Les attaques incessantes contre le système social, la répression policière et le recours répété au 49.3 incarnent bien ce biais purement idéologique. Le modèle de négociation tripartite en vigueur laisse sans doute à désirer. On peut lui préférer un modèle quadripartite ajoutant la socialisation de certains moyens de production par les Fonds Ouvriers et le crédit public – v. Tous ensemble. Mais il est constitutionalisé et il ne permet aucune tyrannie unilatérale de l’Etat qui d’arbitre, dans le meilleur des cas, ne peut s’instituer comme partie pour faire pencher la balance.    

La gauche doit protester avec force et les syndicats devraient immédiatement saisir le Conseil d’Etat ainsi que l’OIT. Le retrait des prestations de travail des travailleurs, qui n’ont que leur force de travail à opposer aux possesseurs des Moyens de production durant la négociation, ne peut en aucun cas constituer une atteinte à la sécurité et à l’ordre public. En revanche, la manque de bonne volonté du patronat de négocier de bonne foi sans traîner les pieds à dessein en jouant le pourrissement du climat social, ainsi que l’inadéquation des politiques financières, monétaires et budgétaires actuelles, constituent des atteintes graves à nos démocraties constitutionnellement vouées à la garantie des droits sociaux et individuels fondamentaux alors qu’elles sont aujourd’hui arbitrairement soumises à une régression sociale qui n’a pas de précédent moderne en ce qu’elle  vise le « retour », sans le moindre état d’âme, à une société de la nouvelle domesticité et du nouvel esclavage. Si nous y ajoutons la récente dérive dictatoriale sanitaire et transhumaniste avec son dangereux ARNm expérimental, la dérive vers l’imposition de  Nouvelles Lois de Manu exclusivistes et néo-nietzschéennes, visant à « dalitiser » les peuples occidentaux, devient honteusement indéniable. (1)

Sans l’indexation à 100 % des salaires sur l’« inflation » ICP, officielle mais également réelle puisque cette dernière s’établit à près du double de la première dans le panier de consommation hebdomadaire, les travailleuses et les travailleurs, les citoyennes et les citoyens dans leur ensemble, sont confrontés à un vol organisé de leur salaire réel et, en conséquence, également de leur salaire différé. (2) Or, ce dernier alimente les cotisations sociales lesquelles financent les indispensables filets de sécurité de la Sécurité Sociale publique sans lesquels le standard de vie général et l’utilité du salaire net individuel diminuent drastiquement.

Soulignons que cette situation inflationniste est destinée à perdurer dans le temps puisque les gouvernements et leurs économistes attitrés – quasiment tous dans cette « dismal science » tant à droite qu’à « gauche » – n’ont pas la moindre idée de ce que sont les inflations, ils ignorent tout de leurs genèses respectives et sont donc fondamentalement incapables de les combattre sans ajouter la crise à la crise, la misère sociale à la misère sociale. (3)

Les travailleuses et les travailleurs ne peinent pas pour le bon plaisir du patron ou de l’Etat bourgeois. Ils échangent leur force de travail pour assurer au mieux leur reproduction humaine et économique ainsi que celle de la société entière. Ils se doivent de défendre leur standard de vie car personne ne le fera à leur place. En le faisant, ils soutiennent la demande interne et par voie de conséquence la bonne tenue de l’économie. La situation inflationniste actuelle les force à exiger l’indexation automatique et légalement sanctionnée du salaire à 100 % de l’inflation officielle alors que les négociations salariales devraient porter sur les compensations qui doivent prendre en compte : a ) l’inflation réelle constatée dans le panier hebdomadaire qui est bien plus élevée ; b ) le partage de la richesse créée par les travailleurs dans leurs entreprises sous la forme de gains de productivité ou bien selon les résultats de l’entreprise, voire de régularisation des effectifs à temps partiel ; et c ) les conditions de travail et la sécurité au travail .

Les primes ne peuvent être que l’exception en ce qu’elles permettent de tenir compte des résultats de l’entreprise qui fluctuent d’une année à l’autre car elles sont par définition ad hoc et font abstraction de la logique sociale du salaire différé, matérialisé par les cotisations sociales. A l’instar des exonérations de cotisations, les primes ne sont qu’un moyen de payer le salaire net par le salaire différé, et donc par un accès moindre et désastreux aux services publics garantis par la Sécurité Sociale qui font pourtant la différence en cas de chômage, de maladie ou de retraite, c’est-à-dire dans tous les cas d’interruption des revenus hors de la responsabilité personnelle du travailleur ou du citoyen. La Sécurité Sociale publique financée par le salaire différé supprime « la peur du lendemain » pour le travailleur et sa famille, et permet d’entrevoir des « jours (plus) heureux », du moins tant que le partage social des richesses produites suit au moins les gains de productivité. Notez que les cotisations patronales sont in fine toujours payées par les travailleurs eux-mêmes en tant que consommateurs puisque elles passent dans les prix de vente. (4)   

Le travail est un droit et un devoir constitutionnel du moins pour toute personne apte au travail ; il est la base matérielle de la citoyenneté. (3) Le contrat de travail est librement négocié par le travailleur dans le cadre des droits garantis par le Code du travail, en prenant appui, le cas échéant sur son organisation syndicale constitutionnellement et légalement constituée pour faire contrepoids à la tyrannie autrement absolue du possesseur des moyens de production. La Loi Auroux affirmait très précisément : « (réformer ) profondément le Code du Travail, en modifiant plus de 300 articles, pour que l’entreprise ne soit pas “le lieu du bruit des machines et du silence des hommes”, selon Jean Auroux lui-même. » puisque «citoyens dans la Cité, les travailleurs doivent l’être aussi dans leur entreprise » (Pour les loi Auroux, voir : https://www.cse-guide.fr/guide-reforme-code-travail/lois-auroux/ )

Bien que mis à mal en ces derniers temps de régression socio-économique, éthico-politique et constitutionnelle, le Code du travail et le droit de grève constitutionnel font partie de la structure démocratique d’ensemble de nos sociétés modernes. Outre l’Etat de droit et la démocratie représentative bourgeoise avec toutes ses limites, la Constitution entérine la démocratie industrielle et sociale dans le cade du Conseil économique, social et environnemental. La négociation entre les différents acteurs sociaux est un droit conçu par les rédacteurs de la Constitution comme un moyen d’assurer la bonne marche de l’économie qui ne peut en aucun cas se résumer à la tyrannie du capital privé et des possesseurs des Moyens de production. (*) Ils entérinaient ainsi le passage de la démocratie libérale classique, censitaire et sexiste, ordonnée autour du contrat de travail portant uniquement sur le salaire net individuel, à la démocratie bourgeoise avancée qui institutionnalisait ainsi une nouvelle époque de redistribution sociale au sein du Mode de production capitaliste, une époque de redistribution reposant sur les circuits plus vertueux du capital profondément modifiés par l’institutionnalisation du salaire différé et par une fiscalité progressive permettant l’intervention régulatrice de l’Etat dans la sphère économique. (Sur les circuits du capital, voir : http://rivincitasociale.altervista.org/une-autre-ineptie-sur-les-circuits-du-capital-de-marx-et-sur-la-realisation-selon-g-dumenil-et-d-levy-dec-22-2019-27-janvier-2020/ )

Ces différentes formes de l’exercice de la démocratie, aujourd’hui soumise à des attaques en règle, doivent au contraire être portées à des niveaux plus élevés en incluant la planification nationale interactive dûment appuyée par le crédit public et par la réhabilitation-consolidation du Conseil Economique, Social et Environnemental ainsi que par la démocratie participative aux différents niveaux – droit de rappel, prudhommes, défenseurs des droits, comités citoyens des plaintes etc.

La défense du salaire réel et du standard de vie est socialement nécessaire pour une autre raison fondamentale. Dans leur ignorance économique démontrée, les dirigeants économiques et politiques actuels, ne connaissent qu’un seul remède aux dysfonctionnements et aux crises économiques: faire porter le poids de la crise aux travailleurs et aux citoyens. Il se trouve que cette stratégie dépourvue de tout fondement scientifique en a encore moins aujourd’hui. Qui peut croire après 4 décennies de déflation salariale que l’on combat « l’inflation » – au singulier – en haussant les taux d’intérêt afin d’induire la récession laquelle, par la magie de la « main invisible » et des fusions, va rééquilibrer les forces du marché, l’offre et la demande globales, en ramenant la demande salariale jugée excessive ( !) à sa juste valeur ?

Comme on sait depuis le pitre R. Solow – pseudo-Nobel d’économie pour son article de 1956 – pour les dirigeants néolibéraux monétaristes actuels le « juste prix du travail » doit s’établir au « seuil physiologique » dans le cadre d’un marché du travail malthusien débarrassé de toutes contraintes, y compris au niveau global grâce à l’actuelle définition de l’anti-dumping de l’OMC qui entérine une concurrence globale au moins disant en faisant abstraction des droits du travail – même ceux, minimum , entérinés à l’OIT – et des critères environnementaux les plus basics. De là les attaques répétées contre le Code du travail et le droit de grève, de là le démantèlement acharné des droits sociaux garantis par l’Etat social.

Pour prendre l’exemple le plus explicite : si le prix de l’énergie importée monte, la baisse sadique des revenus des citoyens, par le biais sournois de l’inflation, ne pourra avoir aucun impact pour limiter cette hausse purement exogène. Au contraire, l’énergie entrant dans tous les processus de production, de transport, de vente et de consommation des biens et services, la baisse des revenus réels des citoyens, et particulièrement des travailleurs, aggravera les choses, induisant la récession sans pallier en rien la hausse des prix de l’énergie. Il en va de même pour l’inflation organique, à savoir la distorsion structurelle de la relation prix/valeur d’échange au sein de la Formation sociale. Ainsi les distorsions de la structure des prix induits par les gigantesques oligopoles actuels, Gafam et autres : normalement le prix d’un produit devrait correspondre d’assez près à la somme des intrants augmentée par un profit, disons, moyen, pour faire court. Ce n’est plus le cas puisque la concurrence imparfaite à la sauce néolibérale et globalisée qui prévaut aujourd’hui, par exemple celle encensée par Jean Tirole, laisse tout loisir à ces transnationales largement abstraites de toute action régulatrice des Etats pourtant souverains, en leur abandonnant le soin de veiller elles-mêmes aux intérêts de leurs clients, substitués à l’intérêt de la société dans son ensemble … Autre exemple, la politique sans fondement – à mon avis criminelle – du Giec inscrite dans l’Accord de Paris qui porte à la baisse structurelle des investissements dans les énergies fossiles lesquelles constituent encore et pour les décennies à venir, le gros de l’offre énergétique. (Voyez le chapitre « La consommation d’énergie dans le Monde, la France, l’Italie et l’Allemagne.» dans http://rivincitasociale.altervista.org/accord-de-paris-climat-decarbonisation-et-problemes-du-ets-le-crime-climatologique-contre-les-pays-emergents-et-la-grande-majorite-de-lhumanite-a-congeler-au-niveau-inegalitaire-de-1990/ ) J’ai dit comment la vie sur terre étant à base carbone, les cercles dirigeants derrière le GIEC ont utilisé la méthode biblique déjà peaufiné en matière de relations sexuelles pour une Espèce à reproduction sexuée, à savoir faire d’une nécessité d’Espèce un péché originel, pour lequel il n’existe d’autre salut que la culpabilité individuelle mais apaisée par la foi béate dans le Crédo des experts et des grands prêtres auto-désignés. Ôter le CO2 qui est bénéfique à la végétation donc au climat, et la préservation de l’environnement et de la santé humaine redeviennent des sujets cruciaux scientifiquement appréhendables quoique peu amènes à la mobilisation des certificats pour polluer et des obligations vertes spéculatives.

Mais revenons aux fossiles. Avec la baisse des volumes mis sur le marché, les prix ne peuvent qu’augmenter structurellement, et ceci sur toute la chaîne de la valeur qui va de la production, à l’échange et à la consommation. L’inflation structurelle, de nature purement monétaire, vient du ratio masse salariale sociale/masse salariale réelle en sachant que la masse salariale sociale, qui cause cette inflation monétaire, naît lorsqu’elle est assumée par l’émission monétaire sans support en valeur d’échange, à savoir par la dette. Lorsque les branches de la Sécurité Sociale prennent pleinement en charge l’assurance et l’assistance sociales publiques – qui sont des droits constitutionalisés – il n’y a pas d’inflation structurelle, puisque le coût est organiquement pris en charge par un meilleur partage de la « plus-value sociale », à savoir les nouvelles richesses produites par la société.

Le partage plus équitable de la « plus-value sociale » se matérialise très concrètement dans la structure du « revenu global net » des ménages, donc dans ses trois composants, soit le salaire net individuel, le salarie différé finançant la Sécurité Sociale et les impôts et taxes qui financent les interventions de l’Etat dans la sphère économique. La structure du « revenu global net » des ménages définit les « époques de redistribution » des Modes de production. Durant son époque néolibérale classique, le Mode de production capitaliste reposait sur une démocratie censitaire et sur un « revenu global net » des ménages réduit à un salaire net individuel de survivance sans salaire différé – sauf celui mis exceptionnellement à disposition par les maigres caisses ouvrières autogérées – et avec une fiscalité reposant surtout sur les douanes et les impôts indirects – taxes sur les péchés etc. La famille élargie et le retour à la campagne en temps de crise faisaient office de sécurité sociale.

L’Etat social qui s’affirmera après la Seconde Guerre mondiale modifiera de fond en comble la structure du « revenu global net » des ménages. Le Code du travail fut démocratisé en posant le pouvoir de négociation des travailleurs par l’entremise de leurs syndicats comme nécessaire contrepoids au pouvoir des grandes corporations capitalistes.(5) On prit également conscience du fait que le travailleur ne devait pas uniquement renouveler sa force de travail pour retourner travailler mais qu’il devait également se reproduire en tant que membre de l’Espèce humaine au sein d’un ménage.(6) A l’Etat était finalement reconnu le droit et le devoir d’intervenir dans la sphère économique pour assurer le bien-être général et agir de manière contre-cyclique pour faire pièce à ce que Keynes appela « les esprits animaux » du capitalisme et de sa mentalité acquisitive. De sorte que le salaire net individuel augmenta selon les gains de productivité alors que le salaire différé fut établi pour financer organiquement la Sécurité Sociale publique laquelle diminue structurellement les coûts de production des entreprises en mutualisant des charges autrement plus lourdes lorsque les régimes sont privés – santé, retraire etc. Enfin, pour financer la régulation étatique dans une économie constitutionnellement mixte, la fiscalité progressive, en particulier sur les impôts directs, fut établie. Dans le « revenu global net » des ménages il faut donc compter ce qui revient aux ménages sous forme d’accès universel citoyen aux infrastructures et services publics collectivement financés. Ce que le « salaire disponible » marginaliste ne fait pas puisque, tout comme le PIB marginaliste, il évalue comme coût tout ce qui compte réellement dans la vie des gens … L’Etat néolibéral actuel vise à démanteler l’Etat social et donc très précisément son époque de redistribution sociale entérinée pas la structure de son « revenu global net » des ménages et tout particulièrement le salaire différé et la progressivité fiscale.

En entérinant l’hégémonie légale de la finance spéculative, l’Etat néolibéral monétariste détruit systématiquement les entreprises publiques et leurs services – EDF, GDF, SNCF, Postes etc. – alors que le capital court-terme phagocyte l’économie réelle. A la dérèglementation et à la privatisation, s’ajoute donc le retour tendanciel au seul salaire individuel net avec la déflation salariale entraînée par l’actuelle définition de l’anti-dumping. Sous couvert de « compétitivité » globale, à savoir la recherche effrénée des baisses du coût de production, plutôt que d’augmenter la productivité réelle par de meilleures techniques et de meilleures organisations du travail, on préfèrera payer de plus en plus ce salaire netavec le salaire différé et avec les impôts prélevés sur les revenus des travailleurs. Parmi eux, plus de la moitié gagne déjà trop peu pour payer l’impôt sur le revenu ; par contre les citoyens paient tous les impôts indirects dont la TVA qui est un impôt particulièrement régressif. Pour comble, la public policy néolibérale monétariste ajoute les soi-disant dépenses fiscales ou tax expenditures –exonérations, crédits d’impôt divers, niches fiscales etc. pour un montant avoisinant près de 320 milliards d’euros par an, dont quelque 110 milliards au bas mot d’exonérations au patronat sans contrepartie pour les salariés, sauf la montée en puissance de la précarité.

Les tax expenditures vont au cœur de la contre-réforme reagnienne, néolibérale et monétariste. Tout d’abord, une fois accordées, elles disparaissent poliment des radars budgétaires – recettes/dépenses – sauf lorsqu’elles peuvent être légitimées par des fonctions sociales, par exemple caritatives. Le montant affiché est donc très réduit. Ensuite, la logique des tax expenditures permet de maintenir le budget en permanence sur le bord du précipice afin de légitimer la poursuite des sacrifices, le tout en y ajoutant la démagogie du poids de la dette publique et l’absurdité selon laquelle « il n’y aurait pas d’alternative » malgré la survivance des principes sociaux dans nos Constitutions désormais foulées aux pieds. Pour faire sérieux, on ajoute quelques fumisteries théoriques comme « l’équivalence de ricardienne » digne de R. Barro et des divers Rogoff , Blanchard et autres.

En bref, le Multiplicateur économique aurait un impact supérieur par la baisse des impôts en comparaison aux interventions étatiques directes ou subventions directes – ou encore, ce qui est toujours tu besogneusement, en comparaison au rôle socio-économique majeur joué par le salaire différé. La réalité est toute autre comme le prouva encore le plan de relance de Obama : même dans ce contexte américain, le Multiplicateur était très élevé lorsque les fonds publics allèrent aux secteurs publics – santé, éducation, ponts-et-chaussées, égouts  – et très faible dans les secteurs privés. Après quoi, en comparant les pommes et les oranges, en faisant abstraction de la structure de l’Etat social pour ne s’en tenir qu’à celle de l’Etat néolibéral, on pourra facilement « démontrer » l’induction d’un Multiplicateur très faible. Les fallacieux « modèles économiques » confirment. Le niveau théorique est très faible alors que « l’austérité tue » bel et bien et qu’en réalité c’est aussi toute la construction marginaliste de la comptabilité nationale qui ne vaut pas le papier sur laquelle elle est écrite. (7)

Pour accélérer la mise en place de cette public policy au sein d’une UE vendue à la « gouvernance globale privée », les dirigeants s’inventèrent un Fiscal compact qui corsète les budgets que les pays membres lui soumettent annuellement pour examen moyennant pénalité financière en cas de dépassement des paramètres permis. Pour la plupart des pays membres, déjà soumis à l’action de l’Euro-Mundell qui impose à tous les conditions prévalant dans les pays du Centre européen, le Fiscal compact exige la réduction de 1/20 par an de la dette au-dessus du 60 % du PIB admis par le Traité de Maastricht. Ce qui induit naturellement une politique asphyxiante de l’austérité que la plupart des pays ne peuvent d’ailleurs pas respecter, ni la France, ni surtout les pays du Sud comme l’Italie. On a recours là-aussi à des subterfuges qui vont dans la logique de la public policy néolibérale, par exemple les projections économiques évaluées par l’output gap, une mesure subjective par définition, de surcroît dérivée de modèles économiques aujourd’hui universellement reconnus comme fallacieux. La sous-évaluation du taux d’inflation programmée est également un grand classique de cette confection budgétaire néolibérale qui consiste à faire tourner les modèles économiques des ministères des finances sur plusieurs années en opérant des ajustements puis en gardant la projection la plus plausible dans le cadre des objectifs de classe et des nécessités de légitimation recherchés. Par exemple les présentations budgétaires italiennes dans le cadre du semestre européen sont trisannuelles. Elles suivent imperturbablement toujours le même schéma : la première année est triste mais tout est fait pour redresser l’économie ; la seconde année montre un mieux et la troisième nous met en vitesse de croisière. Tous les ans, immuablement, on nous sert ces mêmes singeries comptables, ce qui est facile à vérifier. 

Bien sûr, l’essentiel est ailleurs, à savoir légitimer par une plausibilité économique faisant autorité par abus académique et institutionnel, la poursuite de la discipline fiscale et budgétaire néolibérale. Lorsque pour ce faire il manque 3 ou 4 milliards, on fait alors un geste pour taxer les Gafam, mais en baissant très vite le 20 % de prélèvement initialement prévu à 15 % en prétextant des protestations irlandaises sans mettre le moindrement en cause les tax rulings et l’évasion fiscale … En cas de coup dur – crise Covid par ex. – on ira même jusqu’ à endetter les Etats membres avec le programme Next Generation EU, pour permettre aux Etats membres les plus mal pris – spread dégradé sur leurs dettes publiques, déséquilibres variés –de jouir de la cote européenne plus favorable pour leurs emprunts. Mais cette aide, qui viole d’ailleurs toutes les compétences nationales exclusives des Etats membres, notamment an matière d’Affaires sociales, est accompagnée par 528 conditionnalités, pires que celles que le Fmi et la Banque Mondiale imposaient aux pays du Tiers Monde dans les années 80/90.

Ces fonds qui devront être remboursés dès 2027 sont répartis annuellement dans les budgets jusqu’en 2026 alors que le remboursement du 1/20 de la dette publique excédant 60 % du PIB prévu par le Fiscal compact est suspendu sine die. Mais la régressive plausibilité budgétaire est maintenu par cette allocation marginale payée par la dette alors que la logique flat tax est maintenue envers et contre tout. Certains voulaient négocier des conditions moins onéreuses, par exemple 1/30 mais aucun accord à date n’est trouvé. (v. le Rapport Arthuis.) Ceci permet en tout cas de préserver intacte la logique de la public policy néolibérale en écartant toute réelle alternative, en particulier le recours national au crédit public et à la planification tout en laissant la gestion de l’euro à la BCE. En effet monnaie et crédit sont deux choses distinctes alors que le mandat de la BCE ne porte que sur la monnaie commune et, conjointement avec les Etats membres, sur la fixation du taux de change.

Hors recours au crédit public, il n’y a plus de solution rationnelle au remboursement de la dette public, pas même en congelant une partie de la dette publique en continuant à compter sur le QE – quantitative easing – de la BCE. La tentative de re-normaliser le bilan de la FED et de la BCE par le QT – quantitative tightening – a toujours été plus que douteux dans un cadre où le Treasury et les ministères des finances poursuivent encore avec un empressement de zélotes leur politique reaganienne, néolibérale monétariste. Aujourd’hui, avec l’ajout des 3 spirales inflationnistes aucune normalisation ou reset n’est possible. Il suffit de considérer l’effet domino des taux réels très négatifs des obligations d’Etat à 5 ou 10 ans. Comme le démontre, les actuelles attaques spéculatives contre la GB, la finance spéculative va tout faire pour forcer la hausse des taux directeurs en pensant de manière inepte mais très textbook, réduire « l’inflation » – autour de 2 %. (v. la Note 9 ci-bas.) Les Etats membres les plus faibles seront ainsi soumis très rapidement aux conditionnalités du nouvel outil anti-fragmentation de la BCE, le TPI, qui n’est que l’antichambre du MES, le FMI européen du capital global qui ne répond à aucune loi communautaire ou autre …

Notons pourtant le cas de l’Espagne, pays qui dispose d’une meilleure marge de manœuvre pour affronter cette crise, non seulement parce qu’avec le Portugal elle a su s’abstraire du moins en partie de la politique énergétique unique européenne, mais surtout parce qu’elle chemine vers une RTT adaptée à ses conditions. Ce qui lui a déjà permis de créer plus de 750 000 emplois plein-temps avec le salaire différé et les impôts et taxes qui suivent. Après la RTT de la « gauche plurielle » de M. Lionel Jospin, nous avons-là une autre illustration de l’extraordinaire force économique stabilisatrice de ces politiques sociales plus progressives. L’alternative existe bel et bien, elle n’est plus à démontrer. On imagine ce qu’il en serait avec le retour à la planification et au crédit public. (voir : « Espagne : tout ce qui change avec la nouvelle réforme du travail premium », Par Armelle Pape Van Dyck | Publié le 16/01/2022 à 19:21 | Mis à jour le 17/01/2022 à 12:28 , https://lepetitjournal.com/vivre-madrid/entreprise/espagne-nouvelle-reforme-travail-329313 »

La méthode efficace bien que douce consiste dans la récupération du crédit public par les Etats membres de l’Euro en laissant la BCE gérer la monnaie de par son mandat, la gestion du taux de change étant un domaine conjoint. Pour cerner au mieux cette gestion par la BCE les Etats membres peuvent et devraient redéfinir scientifiquement les inflations, ce qui forcerait à redéfinir les champs d’actions respectifs de la BCE, des Etats membres et de la Commission.  Au minimum la prétention monétariste de tout régler par la politique de la banque centrale irait au panier pour le recyclage, son entéléchie. Reprendre le contrôle du crédit public suppose la création d’une banque publique qui aurait pour premier mandat d’acheter/effacer les obligations d’Etat déjà sur le marché avant d’agir directement sur le marché primaire une fois la dette publique ramenée à 30-40 % du PIB. Le second mandat concernerait les nationalisations et les interventions en soutien de l’économie mixte. Le crédit public est une anticipation de la croissance qui supplée au réinvestissement des entreprises publiques ou privés, réinvestissement qui se transforme en moyenne en 60 % de masse salariale et en 40 % de capital immobilisé en moyens de production ou en infrastructures, donc en richesse nationale tangible. Ces anticipations seraient encadrées dans la planification indicative et incitative à la française et soumises à des audits trimestriels pour éviter toute corruption et tout dérapage des coûts. Ce système a permis la reconstruction rapide de la France – et d’autres pays dont l’Italie –après la seconde guerre mondiale avec les prouesses que l’on sait, dont les monopoles naturels, les infrastructures, la Sécurité Sociale, Euratom, la Caravelle, le TGV, le Plan Calcul, etc. sans oublier le plan tourisme et la Côte d’Azur … tout ceci avec une dette publique inférieure à 30 % du PIB, du moins jusqu’à la privatisation de la Banque de France en 1973 par la loi Pompidou-Giscard-Rothschild.

Une telle banque publique offrirait du crédit public à des taux très bas puisqu’elle ne doit pas payer d’actionnaire et doit uniquement assurer ses frais de roulement plus un fonds de provisionnement. Sa création est d’une facilité désarmante puisque l’on utiliserait au départ un ratio prudentiel de 40 pour 1, de sorte qu’avec un milliard destiné aux fonds propre, la banque publique et l’Etat disposeraient immédiatement d’un peu moins de 40 milliards pour racheter la dette et financer ses entreprises stratégiques à moindre coût. Provisionner 2 ou 3 milliards par an est faisable pour le budget dans n’importe quelle situation, surtout en tenant compte du fait que l’accumulation annuelle de fonds propres permettra de baisser tendanciellement le ratio prudentiel pour qu’il corresponde in fine à la seule anticipation économique nécessaire. Une précaution s’impose néanmoins, à savoir que le niveau de contrôle maximum toléré dans les entreprises qui ne seraient pas entièrement nationalisées, serait très bas. Ceci permettra de s’assurer que l’argent provenant des dettes rachetées/effacées par l’Etat à ses créanciers privés n’aille pas coloniser les entreprises stratégiques alors que les créanciers remboursés auraient par contre tout loisir d’investir en bourse, notamment à l’étranger. Peu à peu nous reprendrons le contrôle de l’économie réelle ainsi abritée de toute cannibalisation financière spéculative. En un sens, c’est le rôle joué par les banques régionales allemandes les Sparkassen qui sont étroitement reliées à l’industrie allemande et que l’ex-Chancelière Angela Merkel a sagement maintenues hors de l’emprise de l’Union Bancaire Européenne qui ne supervise que les seules banques systémiques. Rien n’empêche une telle action puisque le crédit est distinct de la monnaie, que la BCE n’a de mandat que sur la gestion de la monnaie et que, en outre, ni le Fiscal Compact ni le Traité de Maastricht ne sont plus respectés. Dans ce cas, abandonner la réforme urgente qui s’impose dans les mains de la Commission européenne qui est strictement alignée sur la « gouvernance globale privée » désormais placée sous le contrôle de l’Axe guerrier Tel-Aviv-Washington, serait suicidaire. A la faveur de la guerre induite et entretenue sciemment en Ukraine par un Axe guerrier impérial qui refuse toute ouverture russe puisqu’il est prêt à « se battre jusqu’au dernier Ukrainien » pour démembrer la Fédération russe, on assiste à la mise sous étroite tutelle de l’UE, à l’instar de la stratégie de domination imposée par l’UE et la Treuhand allemande à l’Europe de l’Est après 1991. Nécessité de l’accumulation du capital oblige, puisque le capital spéculatif new-yorkais et associé n’est plus le bien venu dans les pays tenant à protéger leur économie et la sueur du front de leurs travailleurs.                    

Pour comble de misère politique et théorique, les pays membres de l’Euro s’apprêtent à envoyer à la mi-octobre leur budget à la Commission pour examen mais en prévoyant un déficit d’au moins 5 %, ce qui viole frontalement tant le Fiscal Compact (1/20 au-dessus de 60 % ) que le Traité de Maastricht qui ne tolère qu’un déficit budgétaire de 3 %.

Question : Dans ce cas pourquoi les gouvernements et les partis d’opposition  ne prennent-ils pas acte du fait que ces traités et accords sont caducs, nuls et non avenus puisque inapplicables, de sorte que les Etats puissent appliquer des politiques moins insensées aptes à les sortir du trou noir où ils s’enfoncent actuellement ? Du moins tant que les pays membres ne parviendront pas à négocier une Europe sociale reposant sur l’Europe des Etats-nations. (v. https://la-commune-paraclet.com/EPIFrame1Source1.htm#epi )

 La gauche, redevenue exemplaire dans la défense des grévistes et des autres groupes citoyens, fait-elle vraiment son travail ou bien se contente-t-elle d’accompagner le gouvernement dans ses singeries budgétaires, légitimant ainsi des politiques nocives et dépourvue du moindre fondement ? (8)            

Concernant « l’inflation » – au sens de l’IPC – on notera que les QE successifs n’ont pas créé la moindre inflation au sens de l’indice des prix à la consommation, la FED et la BCE désespérant longtemps de parvenir à 2 %, un niveau encore plus arbitraire que le 3 % du Traité de Maastricht, entendu à l’origine comme simple signal d’alerte pour maintenir une certaine cohérence européenne. Ce 2 % n’est qu’un niveau digne des pseudo-prix Nobel en économie de cette année 2022 qui en savent autant à eux trois sur le sujet que Janet Yellen lorsqu’elle dirigeait la FED. (9) En revanche, on remarquera que la bonne tenue du salaire différé en France, quoique sous attaque continuelle, agit efficacement comme mesure de contrôle de l’inflation structurelle monétaire, reliée aux masses salariales. Ceci vaut pour les aides ponctuelles aidant les ménages et les entreprises à absorber les coûts énergétiques ; ces aides ne sont pas inflationnistes lorsqu’elles proviennent organiquement d’un meilleur partage de la « plus-value sociale ». Aussi, à quoi bon revendiquer des mesures ponctuelles comme des prélèvements symboliques sur les « surprofits » qui sont difficiles à évaluer légalement et fiscalement ? En Italie le prélèvement sur le seul secteur de l’énergie a fait l’objet de constatations légales pour discrimination … Opter pour un prélèvement général sur la base d’une définition conventionnelle des surprofits est un progrès mais reste un pis-aller. Il importerait plutôt de revenir à la fiscalité progressive générale, y compris en matière d’impôts sur le capital. C’est-là la solution la plus simple, la plus élégante, celle qui correspond le mieux à l’esprit et à la lettre de nos Constitutions nées de la Résistance au nazi-fascisme qui instituaient les droits sociaux fondamentaux par ailleurs reconnus dans la Déclaration Universelle des Droits Individuels et Sociaux Fondamentaux de 1948. C’est, selon moi, la solution que les citoyennes et citoyens comprennent le mieux puisqu’elle renvoie à un sens naturel de l’équité et que toute critique portant sur l’aspect confiscatoire est facile à réfuter en expliquant que la base progressive porte sur ce que la situation budgétaire exige, ni plus ni moins, alors que la fiscalité actuelle n’a jamais été aussi inégalitaire qu’aujourd’hui. La philosophie  de la flat tax reste le symbole de cette inique régression fiscale.  

Au fond, en défendant leurs droits, les travailleuses et les travailleurs, les citoyennes et les citoyens dans leurs ensemble, défendent l’intérêt général. Le salaire différé et la Sécurité Sociale sont des conquêtes populaires mais aussi des stabilisateurs économiques sans rivaux. Les inflations, la vie chère, la dégradation des droits sociaux touchent désormais tout le monde à part les 1% et 10 % au sommet de la pyramide. Au demeurant, la bonne tenue de l’économie et de son ère civilisationnelle repose organiquement sur la bonne tenue du standard de vie général.         

Paul De Marco

Voir aussi : « The dismantling of the Social State or of the Anglo-Saxon Welfare State and the monetarist neoliberal policies seen from the angle of the labor-contract » October 4, 2016-April 9, 2020 dans http://rivincitasociale.altervista.org/the-dismantling-of-the-social-state-or-of-the-anglo-saxon-welfare-state-and-monetarist-neoliberal-policies-seen-from-the-angle-of-the-labor-contract-october-4-2016-april-9-2020/ 

Notes :

1 ) Le néologisme « dalitiser », en référence aux camarades Dalits en Inde, désigne le processus de transformation des masses citoyennes occidentales en Dalits, donc en sous-castes. Pour les Lois de Manu reprises par Nietzsche je renvoie à mon essai « Nietzsche et le retour du cauchemar éveillé » dans http://rivincitasociale.altervista.org/nietzsche-et-le-retour-du-cauchemar-eveille/ 

En ce qui concerne le néo-totalitarisme sanitaire doublé par la dérive transhumaniste préventivement dépénalisée, voir  http://rivincitasociale.altervista.org/sars-cov-2-brevesflash-newsbreve/ (Utiliser un traducteur online tel www.deepl.com si nécessaire.)

Voir aussi : Book review: Against the Madness of Manu: B. R. Ambedkar’s Writings on Brahmanical Patriarchy, Selected and Introduced by Sharmila Rege, Navayana Publishing Pvt Ltd, First published in January 2013. Reprinted August 2013, dans https://la-commune-paraclet.com/Book%20ReviewsFrame1Source1.htm#rege

2 ) Notion de salaire différé : les cotisations sont une partie de la « plus-value sociale », les nouvelles richesses socialement produites, entérinée par la structure  particulière du « revenu global net » des ménages. Ce dernier comprend le salaire individuel net, le salaire différé finançant les 5 branches de la Sécurité Sociale et la part des impôts et taxes revenant aux citoyens via l’accès aux infrastructures et aux services publics, de sorte qu’il est quelque peu différent du salaire brut, surtout dans un Etat néolibéral monétariste sacrifiant ces derniers au profit des tax expenditures en faveur du capital et des nantis. Il est surtout diamétralement différent du « revenu disponible » marginaliste qui exclut les composants hors salaire net à l’exception des investissements financiers des ménages … lorsqu’ils existent. Cette « plus-value sociale » est entièrement le fruit du travail. Les cotisations sociales sont du salaire différé puisque elles financent des services sociaux auxquels les les travailleurs et les citoyens actifs ou passifs ne font appel qu’en cas de besoin.

Pour que le système soit soutenable, il n’y a aucune nécessaire solidarité entre générations dans le sens bourgeois du terme selon lequel les retraités recevraient des pensions élevées qui ponctionneraient et pénaliseraient les jeunes. C’est tout le contraire. Au départ, la Sécurité Sociale qui organisait la perception et l’utilisation du salaire différé, reposait sur divers paramètres structurels constitutionalisés, en particulier le plein-emploi à temps plein – le droit au travail constitutionnel ne se concevait pas autrement durant les Trente Glorieuses -, le tout protégé par l’anti-dumping, à l’époque au sien du Gatt. Ceci assurait par définition le fonctionnement du système par la fixation de deux paramètres cruciaux, le taux de cotisation et le taux de versement – par exemple le taux de remplacement du salaire par la retraite, ou le niveau de versement de l’assurance-chômage. Sur cette base, on peut concevoir des médiations sociales propres à tirer le meilleur avantage du système, que ce dernier soit par répartition comme en France ou contributoire mais public en d’autres pays. Ainsi, le système public gagne à être mutualisé sur des bases actuarielles précises, surtout lorsque la démographie est favorable, puisque ceci diminue les coûts ; mais, en principe, rien d’empêche un système public de fonctionner avec un rapport actifs = passifs pour autant que la définition de l’anti-dumping soit au bon niveau. Cependant, le recours à des médiations permet de concevoir plus facilement la solidarité sociale nationale. Par ex., dans le cas des retraites publiques, en prévoyant des minima sociaux et une certaine péréquation entre catégories professionnelles. On soulignera que ces systèmes publics mutualisés reposant sur le salaire différé coûtent moins cher en terme de PIB. Ainsi le système de santé public français actuel –très dégradé par rapport aux années 70 – coûte 12.2 % du PIB alors que le système privé américain coûte plus de 18 % mais laisse quelque 40 millions de citoyens sans couverture et des millions d’autres avec des couvertures insuffisantes. En d’autre-terme, la compétitivité macro-économique des Formations sociales sort gagnante avec les services et les infrastructures publiques lesquelles contribuent à leur tour à abaisser le coût de production des entreprises dont à augmenter leur productivité micro-économique.   

L’organisation et l’utilisation du salaire différé font l’objet d’une lutte de classe acharnée depuis le début avec les premières caisses ouvrières. Les Fonds Ouvriers – proposés par R. Meidner et repris dan mon Tous ensemble – en constituent le point d’aboutissement, inaugurant l’époque de la « plus-value sociale » inscrite dans la socialisation des moyens de production sous diverses formes, en particulier sous la forme de coopératives démocratiquement gérées par les travailleurs eux-mêmes dans le cadre de la planification interactive appuyée par le crédit public..

3 ) Les théories économiques mainstream sont un tissu de falsifications destiné à duper les masses. La preuve scientifique irréfutable jusqu’à preuve du contraire avec droit de réponse selon la déontologie académique, en est fournie ici : a ) Introduction méthodologique ; b ) Hi-han : Les âneries visuelles hallucinatoires des économistes bourgeois et en résumé c ) La pseudo-science économique de la bourgeoisie : voilà pourquoi nous devrions changer rapidement de paradigme économique, les deux premiers tant librement accessibles dans la section Livres-Books de mon vieux site expérimental www.la-commune-paraclet.com , le troisième ici : http://rivincitasociale.altervista.org/la-pseudo-science-economique-de-la-bourgeoisie-voila-pourquoi-nous-devrions-changer-rapidement-de-paradigme-economique/ 

Le Prix Nobel de la paix fut rapidement délégitimé par le déferlement maccarthyste qui précéda les hystéries impériales américano-israéliennes actuelles qui instrumentalisent l’Ukraine pour détruire les rivaux du putatif empire, tant la Russie que l’UE, et tout particulièrement l’Allemagne. Qui se souvient de Jean-Paul Sartre prenant acte de cette dérive ? Il semble que la narration l’emporte dangereusement aujourd’hui dans tous les domaines contre la science et que les pontifes et les grands prêtres sont choisis pour légitimer ces choix idéologiques. En économie, c’est bien plus évident encore avec le prix décerné par la banque suédoise. La désignation des trois derniers « nobélisés » dans la « dismal science » a dû en consterner beaucoup et fait tordre de rire bien d’autres. Je propose qu’à l’instar de Janet Yellen, on leur pose publiquement la question simple « Qu’est-ce que l’inflation ? » Ils pourront ainsi justifier leurs salaires et leurs récompenses. Je renvoie entre-temps à ceci : « The Fed finally admits: it does not know what inflation is », Sept., 21, 2017/ dans  http://rivincitasociale.altervista.org/the-fed-finally-admits-it-does-not-know-what-inflation-is-sept-21-2017/   

Dans le contexte énergétique actuel, concernant la difficile, voire l’impossible tâche, d’opérer un « reset » tant pour la FED que pour la BCE – pour ne rien dire de la Bank of England … – je renvoie à mon THE FED DILEMMA, or how the Marginalists are now trapped into their own shameful narrative,dans https://www.la-commune-paraclet.com/EPI%20TWOFrame1Source1.htm

Pour approfondir sur le sujet de l’inflation, je renvoie  au bref commentaire suivant et à ses liens internes : The inflation narrative and the irreversible ruin of our country, July 4 2022. Includes French, Spanish and Italian versions, dans http://rivincitasociale.altervista.org/the-inflation-narrative-and-the-irreversible-ruin-of-our-country-july-4-2022-includes-french-spanish-and-italian-versions/

Pour la théorie complète, on se reportera à mon Précis d’Économie Politique Marxiste librement accessible dans la section Livres-Books de mon vieux site expérimental www.la-commune-paraclet.com  

4 ) Même Milton Friedman l’avait reconnu dans W. J Cohen & M. Friedman, Social security: universal or selective, American Institute for Public Policy Research, 1972, p 27, ainsi que mentionné dans mon Tous ensemble, 1996 – voir section Livres-Books de mon vieux site www.la-commune-paraclet.com

5 ) Pour une synthèse de la théorie des contrepoids dans l’œuvre de John Galbraith voir la Note 15 sur John Galbraith dans mon livre 3, intitulé Keynésianisme, Marxisme, Stabilité Economique et Croissance – 2005 – livre qui avait prévu la crise des subprimes et ses mécanismes, les « montages » financiers. (Pour aller vite on peut utiliser ce terme dans la fonction « rechercher » )

6 ) Etymologiquement le terme « famille » renvoie à la domesticité, c’est pourquoi j’utilise le terme « ménage ». Voyez également mon essai « Mariages, unions civiles et institutionnalisation des mœurs » dans la Partie rose de mon vieux site expérimental www.la-commune-paraclet.com    

7 ) Voir « The Body Economic : Why austerity kills » dans  http://www.la-commune-paraclet.com/Book%20ReviewsFrame1Source1.htm  

Pour l’absurde construction marginaliste du PIB voir : « Le PIB, outil de narration marginaliste contre le bien-être des peuples et de la prospérité des Etats-nations », 24 mai 2020, dans http://rivincitasociale.altervista.org/le-pib-outil-de-narration-marginaliste-contre-le-bien-etre-des-peuples-et-la-prosperite-des-etats-nations-24-mai-2020/ 

8 ) Voir par exemple, « Rapport Arthuis 2021 : vous avez aimé Thatcher-Reagan, vous aimerez Arthuis version italo-Ludwig-Mises » 5 mars 2021,  dans http://rivincitasociale.altervista.org/rapport-arthuis-2021-vous-avez-aime-thatcher-reagan-vous-aimerez-arthuis-version-italo-ludwig-mises-5-mars-2021/ 

9 ) Voir « The Fed finally admits it does not know what inflation is » Sept. 21, 2017 dans http://rivincitasociale.altervista.org/the-fed-finally-admits-it-does-not-know-what-inflation-is-sept-21-2017/

Il faut souligner l’ineptie de l’économie mainstream – que les Economistes Atterrés partagent. Elle dépasse l’entendement avec ses courbes de l’offre et de la demande supposées donner le juste prix du marché mais qui s’établissent en se supposant l’une l’autre en prix mais à tour de rôle, sombrant ainsi dans le problème logique létal connu comme problème ex ante/ex post après avoir parcouru et assimilé les présuppositions infernales du subjectivisme de l’« utilité » – le calcul des joies et des peines de Menger et al. – présuppositions données comme universelles et pérennes malgré les critiques marxistes ou encore celles de l’école historique allemande de Gustav von Schmoller. Voir le bref résumé « La pseudo-science économique de la bourgeoisie : voilà pourquoi nous devrions changer rapidement de paradigme économique », dans  http://rivincitasociale.altervista.org/la-pseudo-science-economique-de-la-bourgeoisie-voila-pourquoi-nous-devrions-changer-rapidement-de-paradigme-economique/

Ces inepties atteignent de vrais sommets lorsque l’économie mainstream et atterrée en arrive à discourir de l’inflation – au singulier. Dans ma vieille édition du manuel de Samuelson, il est dit qu’en attendant que l’offre et la demande se croisent pour arriver au juste prix du marché rien n’empêche de faire un petit profit. La bar-mitsvah a due être intéressante. Mais même Maurice Allais, un authentique économiste walrasien classique, plus Auguste que Léon, mais aussi un citoyen honnête, capable de proposer des Préférences communautaires pour juguler les dérives du libre-échange et militant actif contre l’AMI, fut lui-même obligé de recourir à ces tâtonnements (selon la métaphore du lac agité de Léon Walras). La plupart oublie le rôle de mystification consciente joué par Irving Fisher, le disciple américain de Böhm-Bawerk, pour falsifier les catégories économiques scientifiques et proposer son amalgame idéologique de l’« income stream » ainsi que sa dérisoire tautologie passant pour la théorie quantitative de la monnaie. (Pour cette falsification je renvoie à mon Introduction méthodologique cité au point 3 plus haut)

La théorie de l’« income stream » visait à falsifier les bases du Livre III du Capital de Marx, à savoir la genèse les trois sources de revenu, salaire, profit, rente qui porte à la compréhension de la lutte des trois grandes classes de l’époque, prolétaires, capitalistes, féodaux ou rentiers ainsi qu’aux possibles alliances de classes définissant les relations juridiques larges au niveau étatique – voir mon Précis – L’amalgame fishérien transformait toutes les classes sociales en une seule formée d’investisseurs disposant d’un « revenu » – capitaliste, ouvrier ou ménagère – qu’ils sont censés investir au mieux pour assurer les flux en choisissant le niveau de risque et la temporalité des investissements contemplés. Comportement obsessionnel typique de la mentalité acquisitive bien observé par Louis Aragon, voir : https://archive.org/details/tntvillage_233383/Leo+Ferre+Chante+Aragon+1961/05-Les+fourreurs.mp3 )

On voit que Fisher ne faisait qu’étendre au Livre 3 du Capital les inepties subjectives que Böhm-Bawerk et l’école autrichienne avaient tenté d’opposer au Livre 1 du Capital en remplaçant la valeur d’échange de la force de travail et la plus-value par l’utilité marginale et la productivité marginale. L’« utilité » est une expression univoque, une fois en prix, une autre fois en quantité, mais sans jamais parvenir à concilier scientifiquement les deux tant au niveau microéconomique qu’au niveau macro-économique. Or, une marchandise qui n’est plus uniquement un produit naturelle est duale : elle ne peut avoir de valeur d’échange – ou prix – sans reposer sur un support en valeur d’usage.  

Bref l’offre et la demande sont censées vous donner le prix juste du marché. Seulement voilà, elles vous donnent aussi le cas échéant une divergence qui constituerait l’inflation !!! Go figure. Mais le catéchisme économique bourgeois n’est pas à une ineptie près. Son seul soucis est de conserver une certaine plausibilité – l’offre et la demande mène au prix, et tant pis si, comme le disait déjà Marx dans les Manuscrits parisiens de 1844, ces oscillations s’annulant dans le moyen et le long terme, le secret de la valeur d’échange – ou du prix – doit nicher ailleurs que dans ces agitations épiphénoménales.

Du moins David Hume avait-il proposé sa métaphore de la pluie monétaire: on a x biens et services à tels prix ; le matin suivant il a plu des billets de banque et l’inflation naît aussitôt puisqu’il y a plus de monnaie pour la même quantité de produits. Avec Fisher la juste quantité de monnaie est égale à la somme en prix des biens et des services – en tenant compte de la vélocité de la monnaie laquelle se résume à la puérilité supplémentaire de la vitesse que met la monnaie émise par la banque centrale pour retourner à la banque centrale. C’est une noria d’ânes à visière. Au mieux – c’est d’ailleurs ce que dit aussi la théorie du capital efficient – le déséquilibre ne saurait durer, car même la spéculation hâterait le retour à l’équilibre. Il faudrait alors suivre le pitre Milton Friedman et mettre la banque centrale sur pilote automatique … Cependant, dans la pratique la banque centrale est l’expression de banques privées qu’elle préserve jalousement de la manière la plus ferme et la plus pragmatique qui soit. Fisher était né riche, il se trompa sur la Grande Dépression et sur la récession dans la Dépression de1937 qu’il n’avait pas vues venir et il mourut pauvre en argumentant, en désespoir de cause, en faveur du « 100% Money». Triste destin.

Il reste que créateur de sa falsification monétaire, Irving Fisher était conscient qu’il lui fallait conserver une certaine plausibilité faute de quoi il ne serait pas suivi. Il inventa donc des indices des prix. Ce fut sa grande obsession, on comprend pourquoi. Le plus fameux est l’ICP. Comme la réalité économique évolue sans cesse et que sa théorie quantitative de la monnaie est comiquement tautologique – malgré les pages véhémentes qu’il écrira pour occulter ce fait patent – comment conserver un certain contrôle comptable et décisionnel ? Avec son ICP il prétend alors pouvoir proposer des « prix constants ». Mais ce n’est-là qu’une habituelle falsification marginaliste de plus : ses prix constants sont uniquement les prix fluctuants constatés ex post sur la base d’une année prise comme base 100 de départ, rien de plus. C’est d’un pathétisme achevé, surtout lorsque vous tenez compte de la Loi Marxiste de la productivité que j’ai proposée sur la base du travail de Karl Marx.     

Notez également que la fonction de production marginaliste micro ou macro s’écrit : y =f (K,L) où K est le capital et L le travail – mais pas nécessairement au plein-emploi comme le voulait Keynes. Ce qui changerait beaucoup de choses. Cette fonction de production n’inclut ni le chômage ni l’inactivité, elle ne considère que l’équilibre au plein emploi qui s’établirait automatiquement lorsque le salaire atteint le « seuil physiologique » – Solow et al. Bien entendu ce seuil néomalthusien est une vue de l’esprit néolibéral, il est purement et dangereusement élastique. Surtout lorsqu’il est entériné par la définition de l’anti-dumping de l’OMC qui accompagne tous les traités de libre-échange. J’ai fait remarquer depuis longtemps qu’aucune version de l’économie bourgeoise, moins encore les théories marginalistes, ne sont capables de faire la différence entre économie réelle et économie spéculative, entre intérêt et profit, entre intérêt classique –déduit du profit – et intérêt spéculatif s’imposant légalement mais fallacieusement comme un taux de profit légitime, ce qui fausse alors toute la structure de pris relatifs et porte fatalement à la cannibalisation de l’économie réelle par la spéculation hégémonique.

La fonction de production micro-économique scientifique s’écrit c = v + pv = p. La même fonction rend compte du capital social – à savoir la fonction macro-économique qui agrège tous les secteurs économiques. Sur cette base émerge le fait que la quantité nécessaire et suffisante de monnaie est donnée par la masse salariale – v – tant réelle que sociale. Tout échange est par nature mutuel, de sorte que les masses monétaires et les rotations de la monnaie échangée contre marchandise, permettent d’effectuer tous les échanges nécessaires et suffisants pour assurer la Reproduction Simple ou Élargie du système de reproduction. En tenant compte de la productivité, on peut dès lors dériver les trois formes principales de l’inflation, l’inflation structurelle, l’inflation importée et l’inflation organique. Je renvoie ici à :

1 ) « The inflation narrative and the irreversible ruin of our country » July-4-2022-includes-french-spanish-and-italian-versions, dans http://rivincitasociale.altervista.org/the-inflation-narrative-and-the-irreversible-ruin-of-our-country-july-4-2022-includes-french-spanish-and-italian-versions/ 

2 ) Pour les développements voir : Précis d’Economie Politique Marxiste

3 ) voir aussi :

« Pouvoir d’achat niveau de vie temps de travail socialement nécessaire et revenu global net des ménages », 2-31 déc 2018/ dans  http://rivincitasociale.altervista.org/pouvoir-dachat-niveau-de-vie-temps-de-travail-socialement-necessaire-et-revenu-global-net-des-menages-2-31-dec-2018/  et,

« Inflation un nouveau cycle écolo-bourgeois absurde s’annonce avec une hausse des prix allant de pair avec la déflation salariale mais donnée pour de l’inflation », 12 mai 2021, dans http://rivincitasociale.altervista.org/inflation-un-nouveau-cycle-ecolo-bourgeois-absurde-sannonce-avec-une-hausse-des-prix-allant-de-pair-avec-la-deflation-salariale-mais-donnee-pour-de-linflation-12-mai-2021/ 

Résumons : Sur la base de ces inepties marginalistes, la FED et la BCE, qui ne conçoivent l’inflation qu’au singulier, se proposent maintenant d’envoyer l’économie, qui ne s’est jamais remise de la sindémie du Sars-CoV-2 et de ses lockdowns, en récession, voire en dépression, après des décennies de déflation salariale, dans l’espoir méta-magique de voir la misère sociale ainsi imposée mener à l’équilibre … entre l’offre et la demande …    

La FED et la BCE ne sont pas entièrement dupes. Elles tentent de faire le minimum de dégâts possible en se concentrant sur l’inflation sous-jacente ou Core inflation, en prétextant – à raison – que l’inflation importée n’est pas entièrement de leur domaine. Mais ce faisant, elles ne font que ralentir la descente en enfer de nos économies désormais entraînée par la puissante spirale des trois grands types d’inflations qui se renforcent mutuellement. Déjà dans mon «THE FED DILEMMA, or how the Marginalists are now trapped into their own shameful narrative.  » dans https://la-commune-paraclet.com/EPIFrame1Source1.htm#epi j’avais montré les limites de la tentative de la FED à mener à bien son « reset » alors que le Trésor et la présidence très buttés sur leur politique fiscale ultra-régressive lui coupaient l’herbe sous les pieds. (Utilisez un traducteur online si nécessaire par ex. www.deepl.com ) C’est l’ineptie plus grande du monétarisme dans toutes ses formes de L. Mises, à Hayek, à Friedman, et tutti quanti, de croire que la politique monétariste pouvait se substituer à elle seule à la politique monétaire et à la politique économique et budgétaire qui devraient, au contraire, aller de pair dans un cade socio-économique planifié.

Les choses iront en s’aggravant très rapidement. En effet, la FED tout comme la BCE sont coincées dans la forma mentis des acteurs économiques dominés par la finance spéculative légalement hégémonique. Alors qu’elles désiraient normaliser leurs bilans avec leurs QT – tout en lâchant du lest comme jamais avec les repos et les reverse repos – elles sont inéluctablement menées à l’abîme par les intérêts réels négatifs et leurs effets sur les CDS dans un contexte de vulnérabilité des banques et des fonds spéculatifs –dont Blackrock – pour ne rien dire de la vulnérabilité de nombreux Etats.

Le cas de la GB du PM Mme Liz Truss est emblématique. Dès le 23 septembre 2022, les évènements s’annoncèrent plus dramatiques qu’au 19 septembre 1949 lorsque la livre sterling subit les attaques du dollar US visant à forcer la GB à abandonner ses préférences impériales reformulées par le Commonwealth en faveur du Gatt dominé par le régime de Bretton Wood sous étroit contrôle américain avec ses deux jumelles, FMI e BIRD, emblématiquement installées à Washington en face de la FED. Dans cette optique, je vous invite à lire les articles référencés ci-dessous en ayant à l’esprit que Mme Truss et son ministre des finances pensaient satisfaire la finance spéculative globale par son programme ultralibéral centré sur d’obscènes réductions de taxes ; bien entendu, quelques unes des aides aux plus démunis pouvaient sembler trop généreuses à des financiers plein de suffisance se souciant bien plus du ratio dette publique/PIB que du standard de vie du menu peuple et tenant peu compte de la montée des Travaillistes dans les sondages. En tout état de cause, ces adeptes de la «voodoo economics » et de sa « fiscal and public policy », n’ont pas la moindre idée du fait que des aides financées par la dette créent de l’inflation structurelle – monétaire – bien plus difficile à contrôler, ce qui n’est pas le cas lorsqu’elles sont financées par l’impôt sur les profits et les dividendes, donc par une meilleure répartition de la « plus-value sociale » correspondant à la valeur d’échange, ou mieux encore lorsqu’elles sont financées par la RTT et le salaire différé et les impôts et taxes qui l’accompagnent.

Lorsque des boîtes spéculatives comme Blackrock liquident leurs margin calls dans les fonds de pension britanniques, cela n’indique pas une obligation de force majeur, les CDS pouvant être reformulés, cela indique au contraire un choix bien prémédité, celui de forcer la BoE à hausser ses taux d’intérêt selon le manuel d’économie mainstrean. En bref, pour combattre « l’inflation », les taux doivent être fixé un peu au-dessus de ce niveau et très en dessus lorsque l’inaction initiale – ou lag –  fait accumuler du retard !!!

Dernièrement nous avons vu le ministre des finances, M. Bruno Le Maire déplorer un prix du gaz liquéfié américain vendu 4 fois plus cher qu’aux industriels américains alors que 10 % du tissu industriel français est annihilé. La hausse des taux d’intérêts directeurs voulue par la finance spéculative aux prises avec les taux réels très négatifs implique le sacrifice final de l’industrie et de l’économie réelle. Les dirigeants philo-sionistes nietzschéens aiment jouer la politique du ressentiment pour dresser les pauvres et les exploités contre les moins pauvres tout aussi exploités. Mais ils font renaître la véhémente opposition de la fraction industrielle contre la fraction spéculative au sein de la bourgeoisie, d’autant plus que la première reste largement nationale alors que la seconde est ouvertement globale et apatride. Dans de très brefs délais ils vont réaliser les énormes dégâts causés par cette politique du ressentiment en leur propre sein. A l’instar de H. Ford et de la maison Morgan. (voir  https://pages.pomona.edu/~vis04747/h21/readings/the_international_jew.pdf )    

Avis aux autres banques centrales et aux gouvernements, en particulier les gouvernements européens de la zone euro. La spéculation hégémonique après avoir phagocyté l’économie réelle, s’apprête maintenant à l’envoyer non pas au tapis mais au cimetière. Sauf si les banques centrales se souviennent que, sans elles, ces institutions financières spéculatives peuvent faire banqueroute, comme Lehman Brothers. Nous ne sommes plus dans un contexte de système fractionnaire supervisé par la banque centrale capitaliste mais dans un système désormais modifié que j’ai baptisé en toute connaissance de cause de « credit without collateral » -voir la Section Economie Politique Internationale de mon vieux site expérimental www.la-commune-paraclet.com   – puisque le ratio prudentiel de facto est maintenant constitué par la banque centrale elle-même, par sa monnaie ex nihilo et par ses bailouts directs et indirects. Le temps est passé où les banques centrales n’avaient pas assez de réserves pour pouvoir résister à la pression des banques privées. Aujourd’hui ces dernières sont en banqueroute permanente mais occultée par l’intervention quasi-automatique de la banque centrale pour leur sauver la mise. Pourtant, dans ces banqueroutes dûment gérées par la force publique, comme cela fut le cas pour la nationalisation de Northern Rock par la recapitalisation publique, réside le vrai reset. Autrement, le reset s’imposera de facto par la plus grande crise socio-économique depuis la Grande Dépression. La Gauche doit en prendre note. Voir :

“It’s A Global Margin Call. I Hope We Survive”, by Tyler Durden,  Monday, Oct 10, 2022 – 01:20 PM, https://www.zerohedge.com/markets/its-global-margin-call-i-hope-we-survive

‘I’d never seen anything like it’: how market turmoil sparked a pension fund selloff , Bank of England stepped in on Thursday to stabilise price of UK government bonds and avert a deeper crisis, Sept 29, 2022 https://www.theguardian.com/business/2022/sep/29/id-never-seen-anything-like-it-how-market-turmoil-sparked-a-pension-fund-selloff

BoE’s New Support Plan Fails As UK Gilt Yields Explode Higher, by Tyler Durden, Monday, Oct 10, 2022 – 10:35 AM, https://www.zerohedge.com/markets/its-extraordinary-boe-unveils-new-support-broken-bond-market

BOE Expands Bond Buying Program Amid Historic Rout To End “Fire Sale” And Halt Market “Dysfunction”, by Tyler Durden,  Tuesday, Oct 11, 2022 – 07:33 AM, https://www.zerohedge.com/markets/boe-expands-bond-buying-program-amid-historic-bond-rout-end-fire-sale-and-halt-market

Comments are closed.